Vuitton, vie privée et personne « morale  » : une exception au droit de communication des documents administratifs

#Responsabilités

Les articles L. 300-2 et L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration prévoient que les documents produits ou reçus par l’administration sont considérés comme des documents administratifs et que ces documents sont communicables aux personnes qui en font la demande.

Ces dispositions s’appliquent notamment aux documents qu’une personne morale de droit privé (dont les fondations) est tenue de transmettre à l’administration pour lui permettre d’exercer ses contrôles.

Néanmoins, l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration prévoit des dérogations. Ainsi, ne sont pas communicables à des tiers les documents dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée.
Le décor juridique est planté… Mais qu’en est-il de la communication des comptes annuels d’une fondation (en l’espèce, la fondation Louis Vuitton) qui est tenue d’adresser chaque année au préfet un rapport d’activité auquel est joint le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels ?

Le Conseil d’Etat répond très clairement :

« Les comptes des fondations n’ayant reçu aucune subvention publique, qui relèvent de la vie privée de ces organismes au sens des dispositions de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration et qui font l’objet des contrôles mentionnés au point 4, ne sont, en l’absence de disposition législative le prévoyant expressément, pas communicables aux tiers ».

 

Le considérant de principe affirme ainsi :

« Ces dispositions doivent être entendues, s’agissant de leur application aux personnes morales de droit privé, comme excluant en principe, sous réserve qu’elle ne soit pas imposée ou impliquée par d’autres dispositions, la communication à des tiers, par l’autorité administrative qui les détient, des documents relatifs notamment à leur fonctionnement interne et à leur situation financière. La circonstance que de tels documents aient été transmis à l’administration afin de permettre à celle-ci d’exercer un contrôle sur l’activité de l’organisme concerné est sans incidence, par elle-même, sur les conditions dans lesquelles des tiers peuvent se les voir communiquer ».

L’affaire est donc dans le sac pour la fondation Louis Vuitton… c’est entendu pour le juge : ses comptes annuels ne se feront pas la malle pour être exposés sans limite. La protection de cette grande maison permet de faire le point sur les règles appliquées aux personnes morales.

Auteur Jean-Noel LITZLER

par Jean-Noël LITZLER