Les Éoliennes devant le juge administratif : le droit de critique n’est pas universel et les personnes publiques doivent établir leur intérêt à agir

#Droit de l’environnement

Projets éoliens : Les autorisations environnementales peuvent être parfois combattues devant le juge administratif par les collectivités territoriales. Sous la condition qu’elles démontrent un intérêt à agir lequel se déduit de leurs compétences et des impacts de la mesure critiquée.

 

L’accès au juge des personnes publiques demeure subordonné au constat d’un intérêt personnel et partant d’une vocation à intervenir dans le « champ » concerné par l’autorisation déférée à censure. Pour les implantations d’éoliennes, c’est non pour les départements et les régions mais oui par les Communes.

Les autorisations environnementales instaurées à partir du 1er mars 2017 (Ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 décret n°2017-82 du 26 janvier 2017 et décret n°2017-81 du 26 janvier 2017) sont principalement régies par les articles L. 181-1 à L. 181-32 et R. 181-1 à R. 181-56 du code de l’environnement.

Conçues comme des outils de simplification et de sécurisation pour les porteurs de projets, imaginées comme des procédures aptes à favoriser la transition énergétique, elles répondent à des règles d’instruction raccourcies et permettent aux demandeurs d’autorisation de n’avoir qu’un interlocuteur unique, à travers les services étatiques.

Ce  régime est commun aux autorisations au titre des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ou des installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA), aux autorisation spéciales au titre de la législation des réserves naturelles nationales ou des réserves naturelles de Corse, aux autorisations spéciales au titre de la législation des sites classés, dérogations à l’interdiction d’atteinte aux espèces et habitats protégés, agréments pour l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés (OGM), agréments des installations des traitements des déchets, déclarations IOTA ; aux enregistrement et déclaration ICPE ; aux autorisation de défrichement ; aux autorisations d’exploiter les installations de production d’électricité, enfin… aux  autorisation pour l’établissement d’éoliennes.

Ces dernières suscitent, on le sait, polémiques et oppositions et il était intéressant de suivre le sort réservé par la jurisprudence aux actions intentées parfois à leur encontre par les collectivités publiques elles-mêmes.

Par deux arrêts rendus le même jour, le Conseil d’Etat tranche la question de la recevabilité de ce type d’actions du point de vue de l’intérêt pouvant donner qualité pour agir, à propos de la contestation de projets d’implantation d’éoliennes.

Ces recours étaient exercés par le Département de la Charente-Maritime (n° 467009) et par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et les communes de Saint-Hilaire et de Meillers (n° 470723). Pour la Haute assemblée : «une personne morale de droit public ne peut se voir reconnaître la qualité de tiers recevable à contester devant le juge administratif une autorisation environnementale que dans les cas où les inconvénients ou les dangers pour les intérêts visés à l’article L. 181-3 sont de nature à affecter par eux-mêmes sa situation, les intérêts dont elle a la charge et les compétences que la loi lui attribue ».

Or, on ne trouve aucune compétence permettant de retenir l’intérêt pour agir d’un Département à l’encontre d’une autorisation d’implanter des éoliennes. On n’en trouve pas davantage pour une Région, nonobstant sa compétence pour élaborer un Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires et des objectifs et des règles portant sur le développement de l’énergie éolienne.

En effet, la Région ne dispose d’aucune vocation légale pour intervenir en matière de protection des paysages ou de la biodiversité. Il en va différemment pour les communes au regard, en quelque sorte, d’un intérêt de proximité, le projet risquant d’affecter directement la qualité de leur environnement et leur attrait touristique, en raison notamment de nuisances paysagères et d’atteinte à leur patrimoine.

Analyse par Serge DEYGAS

Auteur Serge Deygas

par Serge DEYGAS